Avec l’avènement d’internet des images aux genres les plus distincts et aux modes de productions les plus variés sortent graduellement de l’obscurité. Des grands classiques du cinéma aux vidéos de plasticiens connues des seuls spécialistes, tout devient accessible. Non pas que tout se vaille sur nos écrans d’ordinateur, loin de là, mais tout est à portée de main, à portée d’œil pourrait-on dire. C’est la grande et belle nouvelle de ce siècle : le numérique nous fait entrer dans une ère d’abondance.
Quelques œuvres pourtant faisant intervenir les images numériques échappent à cette expérience que nous livre internet. Ces œuvres aiguisent notre curiosité et nous fascinent, car il semble qu’elles renferment une des clés de la fabrique aux images. Je pense aux œuvres temps réel de l’art numérique.
Ici l’œuvre se déploie dans le temps comme dans l’espace et pour éprouver son contenu il nous faut nous déplacer sur le lieu même où celle-ci officie. Une œuvre numérique requiert notre présence et tous nos sens peuvent être sollicités. Il ne s’agit donc plus d’une question de regard comme avec la peinture ou le cinéma mais d’une expérience sensorielle inédite où l’ouïe, le toucher et la vue s’associent étroitement à la vie de l’œuvre.
Ce spectacle où la vie émerge à profusion s’entrelace intimement à nos corps en action et à nos sensations. Partie intégrante des œuvres numériques, nos corps s’exposent ainsi à des aventures inédites. Une sensibilité nouvelle va éclore de cette communion.
L’art numérique met de la vie partout. Sorti du contact d’une œuvre au comportement autonome, où que se pose notre regard, nous percevons à nouveau cette surabondance de vie. La terre ou se posent nos pieds, l’air que nous respirons, le ciel au dessus de nos têtes.
Du caillou à l’étoile, tout semble vif et ardent. L’univers se transforme en un organisme vivant et une multitude de correspondances se tisse entre les règnes. Par un curieux chemin ces œuvres nous permettent de voir et de ressentir ces choses.
Le numérique nous ouvre la voie d’une sensibilité accrue aux mystères de la vie et nous transforme malgré nous en mystiques et en voyants.
Hugo Verlinde
Co-fondateur et directeur artistique du Pixel Blanc